La Cuisine est un Art

Lorsque l’on parle d’art, on cite toujours un écrivain, un musicien ou un peintre dont la mission est de créer un univers illusoire, un paradis artificiel pour nous consoler d’une réalité qui serait absurde. La mission d’un cuisinier est tout autre : en créant un univers qui n’a rien d’illusoire, un paradis qui n’a rien d’artificiel, il nous rapproche d’un Dieu dont je ne sais si tel ou tel chef y croit mais dont je suis certain qu’ils ne le rejettent pas. Et si un grand repas c’est du rêve, de l’illusion et des idées, c’est aussi l’univers des choses les plus simples auxquelles le génie du chef ajoute celui des choses invisibles. Certains cuisiniers nous donnent accès à cette réalité, ils nous la font percevoir dans son évidence concrète parce qu’ils sont, tout simplement des artistes.

Bernard Carrère.


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19 juin 2013

Le Goût des Voyages : Copenhague

La Tresse Danoise

Au départ de Biarritz*, découvrez Copenhague et sa gastronomie.
Une tresse danoise est plus près de la viennoiserie que du pain. Il faut commencer par faire une pâte laminée. Il s’agit en fait d’une pâte constituée de différentes couches et de beurre, une sorte de pâte feuilletée simplifiée.

Ingrédients : 30g de levure fraîche ou en sachet / 125ml de lait entier / 100g de sucre / zeste d’une orange / 1 c. à café de cardamome moulue / 1 c. à café d’extrait de vanille liquide / 1 gousse de vanille / 2 gros œufs / 50ml de jus d’orange frais / 450g + 50g de farine / 250g de beurre / 1 c. à café de sel

Dans un saladier, délayez la levure dans le lait tiède. Ajoutez le sucre, le zeste d’orange, la cardamome, l’extrait de vanille, les graines de la gousse de vanille, les œufs, le jus d’orange et mélangez le tout jusqu’à l’obtention d’une pâte liquide lisse. Dans un deuxième récipient, mélangez 250g de farine et le sel en formant un puits au centre. Versez-y la préparation à la vanille. Mélangez délicatement la préparation et la farine à la main. Lorsqu’elle est devenue homogène, commencez à pétrir la pâte obtenue jusqu’à ce qu’elle soit moelleuse et aérée (pendant 5 à 7 mn). N’hésitez pas à rajouter de la farine si vous sentez que la pâte adhère toujours. Laissez reposer la pâte au réfrigérateur 30 mn, dans un moule beurré et fariné, couverte d’un film plastique. Mélangez 50g d e beurre et la farine dans le bol d’un mixeur et battez la préparation pendant 1 à 2 mn pour obtenir une texture lisse. Dès lors que la pâte précédemment préparée a refroidi 30 mn au réfrigérateur, étalez-là sur un plan de travail fariné pour obtenir un rectangle d’environ 45x30cm sur 5mm d’épaisseur. Versez une partie du beurre uniformément au centre en couvrant 1/3 de la pâte. Repliez le côté gauche de la pâte au centre, couvrez-en à nouveau la moitié de beurre. Repliez maintenant la partie droite de la pâte pour recouvrir le tout. (le premier tour est fait !). Placez la pâte beurrée sur une plaque de cuisson, couvrez là et placez-la au réfrigérateur 30 mn. Sortez votre pâte du réfrigérateur, travaillez-la à nouveau pour former un rectangle et répétez l’opération précédente 3 fois (beurrage, pliage, réfrigération). Au dernier tour, laissez reposez la pâte filmée au réfrigérateur au moins 5 heures. Pendant ce temps, confectionnez la garniture (recette plus bas) et laissez-la refroidir. Après le repos de la pâte, on l'étale pour former un grand rectangle. Sur les côtés, faites des entailles régulières, obliques, en gardant une place suffisante sur une bande au milieu pour y étaler la garniture. Repliez ensuite chaque brin successivement, droite, gauche, droite, gauche, comme une tresse, en faisant se chevaucher les brins pour recouvrir la garniture. Laissez doubler de volume environ 2 heures avant de badigeonner de jaune d’œuf battu et d'enfourner à 200°C pendant 25 à 30 mn.

Idée de garniture : 
La compote Satine de Pierre Hermé : Peler 3 oranges à vif et couper en suprêmes (quartiers d’orange sans peau). Couper chaque suprême en 2 ou 3 tronçons. Faire chauffer 250 g de marmelade d'orange dans une casserole jusqu’à ébullition. Ajouter la pulpe de 3 fruits de la passion et les suprêmes d’orange. Continuer à chauffer et faire réduire. Laisser refroidir avant de farcir la brioche avec.

© Anne Sfez - http://afoodiefroggy.canalblog.com



* Copenhague au départ de l'aéroport de Biarritz avec Scandinavian Airlines SAS : 2 fois par semaine (lundi/vendredi), du 28/06 au 16/08 2013. Renseignements et réservations : www.flysas.com

12 juin 2013

De la mignonnette à la sublime…

« Qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse.  » Bien que cet alexandrin soit de l’un de nos plus grands auteurs romantiques, il apparaît comme discutable, et discuté, par de nombreux amateurs de contenu qui apprécient de surcroît l’élégance et le raffinement du contenant. Mais laissons à Alfred de Musset la responsabilité de son vers pour nous préoccuper de nos propres verres. Ce qui n’est pas discutable c’est qu’un flacon de grande capacité permet toujours un plus grand partage. Partager l’ivresse… pourquoi pas, mais surtout partager le plaisir ! 

Le plaisir, les émotions, les souvenirs, la convivialité… Ouvrir une bouteille, c'est partir en voyage : les routes de Bourgogne, la vallée du Rhône, le Minervois sous un soleil de plomb, le Jurançon sur les contreforts des Pyrénées, les châteaux bordelais, mais aussi les brumes néo-zélandaises, les grandes plaines de Hongrie, la cordillère des Andes chiliennes. Partager un vin, c'est créer un dialogue, entamer une conversation, c'est entrer en contact avec l'autre. Du pilier de bar théorisant sur le côté fleuri du Gamay au patron du CAC 40 décrivant ses regrets d'avoir ouvert son dernier Cheval Blanc 1961 sur un lièvre à la royale malheureusement trop cuit, le vin est un assistant indispensable dans la relation humaine. Qu'on se le dise et l'admette enfin, une fois pour toutes ! Il raconte une histoire. Des histoires. Et des histoires anciennes aussi. Très anciennes…

Il y a environ 3 000 ans par exemple, en Israël, à la mort du roi Salomon, un de ses serviteurs fut sacré roi, par dix tribus sur douze, en lieu et place du propre fils du monarque défunt. Cet homme s'appelait Jéroboam. Ce nom évoque quelque chose à l'amateur de vin que vous êtes. En effet, le Jéroboam est une bouteille de 3 litres pour les vins de Champagne et de Bourgogne et 5,25 litres pour les Bordeaux. Et que dire du fils de Salomon à qui le trône échappe au profit de Jéroboam ? L'histoire a compensé son malheur puisque ce fils, du nom de Roboam (ou Réhoboam) désigne une bouteille de 4,5 litres.
Quittons un instant le royaume d'Israël pour trouver dans la Bible un personnage connu pour sa longévité : Mathusalem.  Selon l'Ancien Testament, il aurait vécu 969 ans. Selon mon caviste, il contient 6 litres de Champagne ou de Bourgogne. La bouteille de 6 litres de vin de Bordeaux est appelée ImpérialeCe fameux Mathusalem serait mort - après une vie bien remplie, vous en conviendrez - l'année du Déluge. Dire que Mathusalem a horreur de l'eau serait bien imprudent, mais…C'est d'ailleurs après ce déluge que Noé aurait - toujours selon la Bible - créé le vin : « Noé se mit à cultiver le sol et planta une vigne. Il but du vin, s’enivra et se découvrit au milieu de sa tente. » Passons rapidement sur cette péripétie, et pardonnons à Noé son ivresse dûe sûrement à sa méconnaissance des effets d'une trop grande consommation. Revenons au Moyen-Orient. En Assyrie plus exactement, où règne Salmanazar de 727 à 722 av. JC. Ce roi a donné son nom à la bouteille de 9 litres (l'équivalent de 12 bouteilles traditionnelles). Il faut savoir que Salmanazar était aussi roi de Babylone sous le nom de Ouloulaï. Bien que plus chantant c'est peut-être moins vendeur que Salmanazar 

Restons à Babylone pour faire la connaissance de Balthazar. Pas le roi mage, mais le prince. Fils de Nabonide, il défend la célèbre ville contre les assauts des Perses. En vain, puisqu'en 539 av. JC, l'empire Babylonien s'effondre et Balthazar laisse à la postérité son nom à la bouteille de 12 litres. Il est à noter que dans la Bible, Balthazar est le fils de Nabuchodonosor. Ce dernier régna de 604 à 562 av. JC sur l'empire Babylonien. C'est d'ailleurs sous son règne que l'empire fut le plus étendu et le plus prospère. C'est aussi lui qui entreprit les plus grands travaux dont les merveilleux jardins suspendus. Si vous avez la chance un jour de partager un Nabuchodonosor de Champagne, vous aurez à soulever plus de dix kilos pour les 15 litres de la bouteille et servir une flûte à vos 150 hôtes. Ils seront enchantés.

Si toutefois vous décidez d'inviter plus de convives au mariage de votre fille ainée, vous pourrez compter sur le roi Salomon - qui régna sur Israël de 970 à 931 av. JC, succédant ainsi à son père David, le tombeur de Goliath - pour vous fournir 18 litres de Champagne ou de Bourgogne. Encore une fois les vins de Bordeaux ont donné un autre nom à ce flacon : Melchior. Ce roi mage à la longue barbe  venue « des sources du Nil » offrit l'or, symbole de royauté, au nouveau-né et à ses parents. Les vins de Champagne proposent encore quelques précieuses bouteilles ; le Souverain contient 26,25 litres, soit l'équivalent de 35 bouteilles, alors que le Primat ajoute une bouteille pour atteindre les 27 litres.
Connaissez-vous Melchisédec ? Oui ? Non ? Ce personnage biblique était roi de Salem - la future Jerusalem - à l'époque du grand patriarche Abraham. Livre de la Genèse : « Melchisédech, roi de Salem, apporta du pain et du vin… » Il perpétue la tradition puisque la bouteille qui porte maintenant son nom contient pas moins de 30 litres. 

N'en versez plus la coupe est pleine. Enfin presque puisque les deux dernières bouteilles - hors modèles uniques réalisés pour battre des records - sont l'Adélaïde (93 litres) et la Sublime (150 litres, l'équivalent de 200 bouteilles). Idéal pour partager avec des amis, et leurs amis, et les amis des amis de vos amis… et leurs parents aussi.
Plus proche de nos habitudes de consommation voici quelques noms et contenances de « petites » bouteilles : le Clavelin typique des vins de Jura (62cl), le Pot bordelais (50cl), la Demie ou Fillette (37,5cl), la Chopine (25cl), ou encore le Quart (20cl) et enfin… la Mignonnette (5cl). Mais là le partage devient vraiment difficile.

Alors qui pourrait prétendre que le vin n'a pas sa place dans notre patrimoine culturel ?