Notre piment d’Espelette, lui, se situe aux alentours des 2 000 unités, ce qui le rend plus parfumé et agréable que fort et brûlant. Il suffit de le voir pousser dans les villages de la zone AOP : Souraïde, Larressore, Aïnhoa, Ustaritz, Itxassou, Halsou, Jatxou, Cambo-les-Bains, Saint-Pée-sur-Nivelle et bien sûr Espelette. Toute autre provenance serait une tromperie avérée. Sa fleur tout d’abord, d’une blancheur éclatante s’ouvre au soleil dès les premiers beaux jours. Puis, le piment lui-même ; vert et hésitant dans sa jeunesse, il devient rouge flamboyant à maturité comme pour affirmer sa force et dire « Voyez, je suis prêt, cueillez-moi ! ». C’est tout un art "d’élever" du Piment d’Espelette. Bien choisir les semences, pratiquer un repiquage minutieux quelques jours après les semis. Planter en plein champ entre mai et juin. Faire face aux maladies et enfin récolter. Cette dernière opération entièrement réalisée à la main des premiers jours d’août au 1er décembre est échelonnée. Un pied donne environ vingt piments par saison.
Pierre Ustaritz fait partie des producteurs affiliés au Syndicat du Piment d’Espelette - le seul organisme reconnu par l’INAO - et se soumet aux règles d’un Cahier des Charges strict et précis. Ancien charcutier à Biarritz, il cultive avec sa fille Stéphanie, sa femme et ses employés sur les hauteurs d’Ustaritz environ 34 000 pieds. Dès les premières récoltes, les piments sont séchés sur des clayettes pendant quinze jours minimum. Déjà les arômes s’échappent du fruit par sa fine peau qui flétrit et prend une teinte rouge sang comme les volets des maisons voisines. L’équeutage, qui consiste à ôter le pédoncule et la collerette, est ensuite pratiqué soigneusement, et avec des gants. « Je ne vous conseille pas de vous gratter l’œil pendant l’équeutage. Sinon vous riquez de vous en souvenir » prévient Pierre en souriant. Le passage au four prend trois jours avec une augmentation progressive de la chaleur pour atteindre 65° durant les dernières heures. Les piments sont alors moulus et conditionnés sous-vide dans des poches de 1kg. La production est achevée, il faut attendre maintenant les prélèvements des contrôleurs pour valider, ou non, le lot. Lorsque le poinçon est apposé, la poudre est présentée devant un jury - tous les jeudis - pour obtenir une homologation officielle. Sans cet accord, la vente n’est pas possible. La mouture de la poudre ne doit pas dépasser 5 mm d’épaisseur et ne pas présenter de défaut de cuisson (grillé excessif, amertume prononcée).
Ces certifications concourent au respect et à la qualité du piment d’Espelette AOP. C’est ainsi que l’on peut relever, agrémenter ou assaisonner nos plats de poudre, de gelée ou de confiture, mais aussi décorer nos cuisines de cordes de Piments d'Espelette sans craindre la contrefaçon. Une dernière chose : si un jour, vous voyez sur un marché du Piment d’Espelette en vrac à l’air libre, passez votre chemin, c’est du faux.