La Cuisine est un Art

Lorsque l’on parle d’art, on cite toujours un écrivain, un musicien ou un peintre dont la mission est de créer un univers illusoire, un paradis artificiel pour nous consoler d’une réalité qui serait absurde. La mission d’un cuisinier est tout autre : en créant un univers qui n’a rien d’illusoire, un paradis qui n’a rien d’artificiel, il nous rapproche d’un Dieu dont je ne sais si tel ou tel chef y croit mais dont je suis certain qu’ils ne le rejettent pas. Et si un grand repas c’est du rêve, de l’illusion et des idées, c’est aussi l’univers des choses les plus simples auxquelles le génie du chef ajoute celui des choses invisibles. Certains cuisiniers nous donnent accès à cette réalité, ils nous la font percevoir dans son évidence concrète parce qu’ils sont, tout simplement des artistes.

Bernard Carrère.


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16 novembre 2010

Les Eaux de Vie du Pays Basque

 Le “Traité sur la Conservation de la Jeunesse” de l’alchimiste catalan Arnaud de Villeneuve traite dès le XIIIème siècle de “cette eau de vin, que quelques uns appellent eau de vie, nom qui convient, puisqu’elle fait vivre plus longtemps”. Si l’on en croit Villeneuve, et son disciple Raymond Lulle, dit “l’illuminé”, nous devons la découverte de la distillation à un médecin arabe qui constata qu’en faisant cuire des légumes entre deux plats, la légère vapeur qui humectait celui du dessus prenait le goût et l’odeur des légumes. C’est vers l’an 1300 que “l’illuminé” ramena d’Espagne le secret de la distillation et en définit la méthode : “Prends vin très bon, de quelconque couleur, mais plus vineux que doux, lequel tu distilleras en alambic par quatre fois, en la sorte qu’on prépare communément eau-ardente”. Cette eau de vie, écrit Villeneuve “prolonge la santé, dissipe les humeurs superflues, ranime le cœur et conserve la jeunesse”, ce que confirme Ambroise Paré : “l’eau ardente est un parfait remède pour soigner ses malades”. Seule victime reconnue de cette “potion magique”, le roi de Navarre Charles le Mauvais qui aimait qu’on le frictionne d’un drap imbibé d’eau de vie : un serviteur  approcha une bougie du drap et le roi mourut au milieu des flammes !
Quelques 617 ans plus tard, toujours en Navarre, et plus précisément en Basse Navarre,  Martine Brana perpétue avec un talent héréditaire le patient travail de distillateur que lui a appris son père.
C’est dans son verger de Saint-Martin d’Arbéroue que Martine sélectionne “ses” poires William’s. Seuls les fruits arrivés à maturité sur l’arbre, sains et gorgés de sucre, sont retenus et délicatement acheminés vers la distillerie de Saint-Jean-Pied-de-Port. Commence alors une lente fermentation minutieusement surveillée durant un mois. Ensuite, jours et nuits, s’élabore dans de somptueux alambics en cuivre rouge la distillation qui fait de la “Poire Brana”, selon la plupart des chefs, “la meilleure poire du monde”. Comment un tel miracle s’est-il produit ? Comment cette “eau de vie” qui coule lentement de l’alambic garde-t-elle, en elle, toute la saveur et la finesse des poires du verger planté par Etienne Brana ? Je vous l’ai dit, c’est un miracle ! Et si en cette période de crise il faut croire en quelque chose de bon, pourquoi ne pas commencer par un miracle ?
D’autres eaux de vie - Framboise, Marc d’Irouléguy - sont de la même veine. A consommer avec modération.

Distillerie Brana 

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