La Cuisine est un Art

Lorsque l’on parle d’art, on cite toujours un écrivain, un musicien ou un peintre dont la mission est de créer un univers illusoire, un paradis artificiel pour nous consoler d’une réalité qui serait absurde. La mission d’un cuisinier est tout autre : en créant un univers qui n’a rien d’illusoire, un paradis qui n’a rien d’artificiel, il nous rapproche d’un Dieu dont je ne sais si tel ou tel chef y croit mais dont je suis certain qu’ils ne le rejettent pas. Et si un grand repas c’est du rêve, de l’illusion et des idées, c’est aussi l’univers des choses les plus simples auxquelles le génie du chef ajoute celui des choses invisibles. Certains cuisiniers nous donnent accès à cette réalité, ils nous la font percevoir dans son évidence concrète parce qu’ils sont, tout simplement des artistes.

Bernard Carrère.


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21 décembre 2010

Le Gâteau Basque

Si l’on en croit la légende, c’est à Cambo qu’il faut rechercher l’origine du gâteau basque. Dès le XVIIIème siècle, un gâteau du nom de «Biskotchak» était offert aux voyageurs de passage dans ce village où s’ouvrirent les premières pâtisseries du Pays Basque. Un siècle plus tard, nous content certains grimoires, une jeune pâtissière du nom de Marianne Hirigoyen vendait aux curistes venus prendre les eaux «le gâteau de Cambo». Sa réputation dépassant très vite les contours de son village, Marianne fut dans l’obligation de prendre régulièrement la diligence de Bayonne pour livrer son «Gâteau de Cambo» par paniers entiers ! Et c’est ainsi que, jeudi après jeudi, ses nombreux clients l’attendaient Place du Pilori, derrière la Cathédrale, pour faire provision de ces gâteaux faits, apportés et vendus par une basquaise qui prendront très vite le nom de «Gâteau Basque».

"Amak irin balu opil balaidi"
Si ma mère avait de la farine, elle ferait des gâteaux - dit le dicton. Pour ce qui est du «gâteau basque» c’est plutôt à sa belle-mère que Marianne Hirigoyen doit d’avoir laissé son nom à la postérité. Lorsque, en l’an 1832, Marianne Hirigoyen épousa Bernard Dassance, sa belle-mère, Joachine Jauréqui, lui confia le secret de fabrication de son gâteau, secret qu’elle transmit à son tour à sa fille Marie Dassance, pâtissière, qui épousera Pierre Dibar en 1871, et dont les deux filles Anne et Elisabeth, connues sous le surnom des «Sœurs Biscotx» perpétuèrent la tradition familiale du «gâteau Basque de Cambo» jusqu’en 1935, date où elles fermèrent leur «Pâtisserie Marie-Anne» de la rue des Terrasses. En 1939, après le décès de sa sœur Anne, Elisabeth vendit la fameuse recette du «Gâteau Basque» à un pâtissier de Cambo dénommé Ingres, faisant de ce gâteau familial un gâteau à la mode largement diffusé et très vite accaparé par des professionnels agrégés en dérives profitant du fait que le Pays Basque n’étant pas reconnu géographiquement, aucune protection juridique ne protège son gâteau.  
Si le gâteau basque que nous connaissons doit le croquant de sa pâte sablée à sa richesse en beurre et en sucre cristallisé et le fondant ou le mœlleux de son cœur de gâteau à la saveur incomparable à sa garniture : crème ou cerises d'Itxassou, il n’en fut pas toujours ainsi ! La vache, la betterave, l’orge, le seigle ou le blé étant jadis étrangers au Pays Basque, seul le saindoux (*), le miel et le millet entraient dans la composition du «etxeko biskoxa» - gâteau de la maison - dont on peut affirmer sans crainte qu’il y a autant de gâteaux basques que de cuisinières et qu’il n’a jamais été pensé comme un produit de commerce jusqu’à ce que la perversité du tourisme - à toute chose, malheur est bon… - en fasse un produit phare du Pays Basque.
En homme de parole - à tous les sens du terme - Bixente Marichular, créateur du Musée du Gâteau Basque de Sare, aime conter l’histoire, le goût, les saveurs et les étapes de la fabrication du gâteau basque. Avec sa passion du partage cet artiste en pâtisserie m’a permis de découvrir, sinon les secrets de la recette du gâteau basque, du moins un peu de son mystère, en m’offrant, toutes papilles ouvertes, un merveilleux voyage au pays du gâteau basque. Qu’il en soit ici remercié.

(*) le petit cochon en pâte sablée de chez Péreuil à St-Pée-sur-Nivelle en est une réminiscence.

Quelques adresses : Barbier-Millox à St-Jean-Pied-de-Port, Pereuil et Darrigues à St-Pée-sur-Nivelle, Le Moulin de Bassilour à Bidart, Arraya à Sare, dont le nom reste lié à Jean Fagoaga, ancien maire du village, qui a remis le gâteau basque au goût du jour, Min ondo à Irissary, Maïtena Erguy, Mauriac, Moko Fin et Raux à Bayonne, Adam, Paries et Etchebaster, le tiercé gagnant de St-Jean-de-Luz, Miremont et Henriet à Biarritz, Supervie et Mandion à Anglet sans oublier «Euskal Biskotxaren Erakustoria», le Musée du Gâteau Basque de Sare érigé dans la plus pure tradition de l’architecture labourdine, avec son lorio, sa façade à colombages et ses murs en pierres de la Rhune. Que ce soit dans sa «sukalde» - cuisine - du XIXème siècle ou dans les autres coins et recoins de cette adorable maison, la tradition gourmande du Pays Basque est ici, partout, au rendez-vous.

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